Bujumbura

Publié le par Pascal



Je decouvre un peu plus le Burundi sur le trajet en bus vers Bujumbura. La route monte de plus en plus evidemment et les vallees deviennent de plus en plus profondes. Le vert humide est la tonalite dominante. Rapidement pourtant, nous retrouvons la plaine a Nyanza-Lac et ce jusqu'a bon port. On est de suite intrigue par le nombre de personnnes utilisant leur velo pour transporter toutes sortes de choses : bananes, sacs de charbon, portes, meubles, femmes en amazone, herbage pour nourrir les bovides..... Les cyclistes sont le plus souvent a pied et poussent leur velo peniblement, a la queue leu leu sur des pentes a faire palir le maillot rouge a petit pois du tour de France .La lac est tout proche a quelques metres sur notre gauche et a chaque arret c'est une puissante odeur de poisson qui envahit le taxi-bus. Le marche de Rungis en comparaison sent la lavande.



En approchant de la ville, on apercoit des centaines de  femmes et enfants se suivre en file indienne sur de tous petits chemins pour disparaitre mysterieusement, happes par le haut des collines. Eux aussi peinent a la tache, bidons d'eau et kilos de bois sur la tete. On a l'impression d'avoir litteralement rapetisse et de se trouver dans une vraie fourmilliere ou chaque fourmi suit sa tache placidemment. Il y a aussi malheureusement une mutitude de gens desoeuvres, assis sur le pas des maisons, comme petrifies par leur inactivite et leur manque de ressources. Ce sont des quartiers entiers qui comme Beckett semblent attendre Godot, le regard triste et vide.






 Ce qui marque le plus en entrant dans Bujumbura c'est la densite humaine. Apres le Mozambique et la Tanzanie qui sont parfois de vrais deserts, c'est sur que cela change un peu. Les rues sont investies par des centaines de voitures ou moto taxi, par une foule bruyante et peu disciplinee qui fait ses emplettes. La ville en elle meme est assez moderne, les batiments sont hauts et assez neufs. Les internets cafe et les magasins de telephone  fleurissent a chaque coin de rue. Le must le plus ultra, il y a des patisseries! Ah comment vous raconter le plaisir de se retrouver  apres trois mois dans la brousse devant un croissant ou une omelette fourres au jambon et au fromage, et avec du vrai jambon en plus! Mes papilles cocorico renaissent de leur longue lethargie tropicale. Bujumbura offre d'ailleurs d'autres plaisirs pour la langue .... elle est reputee pour etre une des meilleures tables de l'Afrique Centrale. On peut y gouter des plats locaux comme le "michopo" (de  la chevre grillee sur lit d'oignons), des plats haute cuisine francaise, sans oublier  les frites dernier heritage des anciens colons belges. Le soir les restaurants se remplissent d'expats et de burundais de la haute. Les ONG sont plethore ici et fournissent a la ville son quota de blancs. Leur enseignes rivalisent pour aguicher le regard du badaud, histoire d'augmenter leur prestige. Les 4/4 rutilants estampilles CICR, UNCR, Handicap International, CARE, etc... sillonnent la ville, un peu comme des navettes spatiales extraterrestres tant le contraste est grand avec le niveau de vie locale. Le pire ce sont les voitures de l'ONU et leur camp pres de la plage qui ressemble a un vrai film de guerre americain. Mais bon, on ne va quand meme pas cracher dans la soupe et on peut bien leur pardonner ce cote un peu Cow Boy, car  le pays est presque pacifie maintenant. Les dernieres roquettes tombees sur Bujumbura datent de la fin de l'annee passee. Les habitants sont en general tres aimables et tres doux, du moins pour ceux qui ont un certain niveau d'education. Les femmes sont particulierement belles avec leur elegant nez tout fin et leur peau caramel.


  Aller faire un petit tour dans le marche central cela ressemble a une expedition. Il faut lentement se laisser englouttir par la maree humaine provinciale pour essayer de passer inapercu. Bien sur, le subperfuge est ephemere et les quantites de legumes, viandes, habits amoncelles sur les comptoirs ne parviennent pas longtemps a cacher la blancheur de ma peau. J'ai l'impression d'etre Moise traversant la mer Rouge tant les gens s'ecartent devant moi etonnes de la presence d'un Mzungo ( blanc pour ceux qui ne suivent pas).  La plupart sont rudes, indifferents  a la limite de l'amabilite et l'on sent que la vie est bien dure malgre la richesse des etals. La politesse legendaire du burundais n'est pas de mise ici.Les stands de pagnes inondent mes iris de couleur jusqu'a presque m'en faire vasciller. Je retrouve egalement mon regard 360 degres de cameleon afin de debusquer les eventuels pickpockets qui pullulent entre les poireaux et les poissons seches.








  Le soir, je prend plaisir a aller au Cercle Nautique observer le coucher de soleil sur le Lac Tanganyika et ses timides hippopotames qui parfois sortent de leur longue sieste, et deguster un delicieux filet de lotte grille. Ensuite, la folie des nuits bumjumburoises peur s'offrir a moi. La ville est en effet egalement reputee  pour son gout pour la fete. Au Havana, Thierry et Fleury deux vieux briscard et anciens noctambules averes me racontent que meme pendant la guerre, tous les pays du coin aimaient venir  y oublier l'odeur de la poudre. Les gens adorent venir voir ce qu'ils appellent  le "karaoke", c'est a dire des concerts Live de groupes  interpretant des chansons connues. Cela va de Bob Marley a la variete francaise, et j'avale presque ma biere de travers quand j'entends les gens hurler de joie aux notes de "souvenir, souvenir" ou "capri c'est fini". Kitchissiiiiiiiiime ! La soiree se termine tout de meme par une demonstration suggestive de Ndombolo: femmes a quatre patte par terrre, hommes dehanchant leur bassin comme en faisant du Oulahop, et autres vibrations fessieres. Bien sur presque impossible de sortir de l'equation belle femme=prostituee mais on a quand meme le droit de toucher du regard n'est ce pas? Apres avoir saute dans un taxi pour eviter les brigands morts-vivants qui sortent de leur tombe pour attraper les alcoolises de fin de soiree, je me refugie dans mon bienveillant Hotel Ledoyen.





Ce matin je brosse ma belle criniere feline. Je me sens presque aussi redoutable que Samson qui tirait sa force de sa chevelure. Machinalement je regarde mon peigne pour verifier qu'il n'y aie pas une tique perdue ou autre opportuniste qui me ramenerait direct a la case depart a Paris. Et qu'elle n'est pas ma surprise d'en sortir un... puis deux ...puis  trois....  poux! Et oui cela fait vingt cinq ans que je n'ai pas vu fretiller ces petites betes sur mon cuir chevelu!. Vous non plus j'imagine d'ailleurs! Je ne m'affole pas et vais visiter une deuxieme fois la pharmacienne qui m'a deja vu debarquer la veille pour une infection purulente sur la moitie de mon nez due a un gourmand et invisible insecte burundais qui s'amuse a se ballader sur la peau des gens. Sans gene n'est ce pas? Elle se marre et me dit "des poux mais ou est ce que vous avez chope cela, ici cela n'existe pas depuis bien longtemps, je n'ai pas de remedes pour vous a part vous couper les cheveux?" Bref, apres avoir parle de profil au gens pendant une journee pour leur eviter mon cote elephantman, me voila a arpenter les 15 pharmacies de la ville pour trouver une solution a mon probleme. Je suis recu avec toujours le meme sourire au bord des levres (tiens un blanc pouilleux en Afrique  c'est le comble non!), toujours la meme consternation et toujours la meme reponse negative. Apres avoir tout essaye, coiffeurs, magasins cosmetiques, boutiques veterinaires dont l'aide est toujours aussi caduque, j'ai la lumineuse idee d'aller chercher des vieilles recettes de grand-meres sur internet. La, nerveusement je me tord de rire en lisant leur conseils divers: cela va jusqu'a mettre se des oeufs, de la mayonnaise et de l'essence de lavande sur la tete, deux trois fois par semaine! Merci grand-mere! Je me resigne tout de meme utiliser la recette, non moins ridicule et qui semble faire l'unanimite, consistant a garder toute la nuit, sous un bonnet de piscine, les cheveux abondemment enduits d'huile de table. Il ne faut pas oublier la petite touche de vinaigre pour terminer l'assaisonnement. Je vous jure que vous endormir dans une odeur de cheveux-vinaigrette, cela n'a rien de tres sexy! Samson tu n'avais qu'a bien te tenir!







A part ses poux, l'un des autres attraits de Bujumbura c'est sa plage qui se remplit de simili-estivants le dimanche apres-midi. A Saga-plage le Tanganyika prend alors des allures de station balneaire: enfants jouant sur le sable, couples profitant de leur bonheur mains tendrement enlacees, hommes embrassant leur biere au soleil ....   Visiblement, rares sont les personnes sachant nager, la tradition n'est pas vraiment maritime par ici (regardez sur une carte vous comprendrez pourquoi). Il est donc tres amusant d'observer une foule elle meme observant les courageux qui s'agitent sur le bord de mer pour ne pas se noyer! Bien sur ce n'est pas Copacabana, mais un peu de sable fin en plein milieu de l'Afrique cela a de quoi surprendre!
L'ambiance de fin de dimanche apres-midi, internationalement lugubre pour l'homme seul, a finalement raison de moi.  Heureusement, le me retrouve dans un restaurant chinois a me tordre de rire devant  "le fugitif" avec Depardieu et Pierre Richard. Comme quoi il n'y a pas de petits plaisirs en voyage...


Je pars demain dans l'interieur comme ils disent ici.


Affaire a suivre.........

 

Publié dans La route

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C
Des poux!! Mon Dieu quelle galère!!! J'ai connu ça quand j'avais 7 ans et je m'en souviens encore!! Tu as trouvé la meilleure recette de grand mère, 2/3 d'huile d'olive et 1/3 de vinaigre (blanc de préférance). Il eu été dommage de couper cette crinière de lion!!!<br /> Bon courage mon Toctoc, et, au fait, ça va mieux ton nez? Pas pratique pour draguer!<br /> Take care, beijinhos.
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